MEMENTO DE CARTES
CHINE ( Xin Jiang )
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KARAKORUM HIGHWAY
Pakistan / Chine
par la Khunjerab Pass (4 733 m)
Zoom 1. Chine : un axe facile d’accès vers le sud et la frontière
Un cadre de hautes montagnes disposant d’un atout exceptionnel, une très vaste vallée
Cette Chine est un pays de très hautes montagnes frontalières. A l’ouest se trouve en effet la chaine du Sarikol qui marque la frontière avec l’Afghanistan et le fameux couloir de Wakhan (hors image). A l’est se déploie la chaîne de Maztagata qui culmine plus à l’est (hors image) à 5.749 m. dans la région, mais qui appartient à un ensemble montagnard beaucoup plus vaste, le Kunlun Shan.
Au centre, entre les deux chaines de hautes montagnes, se déploie un vaste dépression tectonique et topographique orientée nord/sud. Elle est drainée depuis la passe frontalière de Khunjerab par un vaste système central coulant vers le nord jusqu’à la ville de Taxkorgan (hors image). Ces eaux obliquent ensuite brutalement vers l’est pour traverser la puissante chaine du Kunlun Shan en rejoignant le fleuve Yarkant He qui se perd dans le vaste bassin désertique endoréique du Tarim.
Pour sa part, l’itinéraire chinois de la Kakoram Highway continue vers le nord pour atteindre la ville de Kashgar, après avoir cependant du passer des gorges très profondes – le Gez River Canyon - à la hauteur du massif du Kongur Shan qui culmine à 7.546 m. Si un lac de barrage apparaît au nord de l’image, la région est relativement sèche du fait de son climat d’abri et quasiment désertique, les rares établissements humains (Pirali…) s’installant dans l’axe central.
Mais cette grande vallée intramontagnarde présente un atout géostratégique majeur pour la Chine : large, de faible pente et d’altitude moyenne, elle constitue un couloir majeur facilement praticable vers la frontière pakistanaise et la passe de Khunjerab. C’est ce couloir qui est valorisé par la Karakoram Highway. Sur cet itinéraire, les checkpoints sont nombreux et ralentissent parfois sensiblement les temps de déplacement alors que les autorités chinoises interdisent aux quelques touristes et voyageurs tout itinéraire personnel au profit des lignes officielles de bus encadrées par un guide. La frontière proprement dite est donc doublée d’une profonde zone frontalière particulièrement surveillée.
Zoom 2. La passe de Khunjerab : un très haut col au rôle géostratégique
Une frontière internationale sur une haute chaine de montagne
Cette image couvre toute la chaîne du Karakoram qui fait la frontière entre la Chine et le Pakistan. Historiquement défini à partir des intérêts britanniques, son tracé suit globalement la ligne des hautes crêtes des massifs les plus au nord. Comme le souligne le géographe et diplomate Michel Foucher, cette frontière entre la Chine et le Pakistan est définitivement actée entre 1960 et 1963 ; en même temps que celles avec la Corée du Nord, la Mongolie, le Myanmar/ Birmanie, le Népal et l’Afghanistan. Le contexte géopolitique continental et mondial joue alors un rôle déterminant pour rapprocher la Chine et le Pakistan : rupture de la Chine maoïste avec Moscou et montée des rivalités entre les deux puissances, conflit armé en octobre 1962 avec l’Inde sur l’Aksai Chin, qui se situe plus à l’est (hors image).
Cette chaîne est elle même subdivisée localement en une série de très puissants massifs bien individualisés par de profondes vallées d’origine glaciaire. Les altitudes y sont considérables comme en témoignent le Karum Koh (7164 m), le Kachanai (6436 m), le Chapchingal Sar 1 (6265 m), le Kunjerab Sar (6100 m) qui domine au nord la passe de Khunjerab. Du fait de l’altitude et de la pluviosité, les appareils glaciaires occupent une place considérable et jouent un rôle déterminant dans la morphologie régionale.
Comme le montre bien l’image, la dissymétrie est totale entre le système chinois et le système pakistanais. L’accès côté chinois est, comme nous l’avons vu (zoom 1), relativement facile du fait d’une large vallée nord/sud qui vient buter sur la chaine de Karakoram. La situation est totalement différente côté pakistanais puisque la haute vallée de l’Hunza, qui donne accès à la passe, doit couper perpendiculairement la puissante chaine du Karakoram. Les pentes y sont très fortes, la vallée très étroite et très sinueuse.
La passe de Khunjerab (4733 m.) : un des plus hauts cols frontaliers au monde
Dans ce contexte régional, les cols - ou passes – se trouvent à des altitudes très élevées et sont difficiles d’accès (cf. passe transfrontalière de Bovhil à l’ouest, Uprang La Pass à 5243 m en Chine). Pour sa part, la passe transfrontalière de Khunjerab est située à 4733 m. d’altitude, ce qui en fait sans doute un des cols frontaliers les plus élevés au monde. Celle-ci est localement assez évasée et la frontière y est symbolisée côté chinois par une immense porte en pierre inaugurée en 1982. La passe de Khunjerab se situe à 120 km de Sost et 270 km de Gilgit côté pakistanais, et à 130 km de Taxgorkan et 420 km de Kashgar côté chinois.
La ville de Sost : une ville frontalière de première importance
Prenant sa source sous la passe de Khunjerab, la vallée de l’Hunza sert de corridor pour la KHH. Longue de 190 km, cet affluent de la Gilgit puis de l’Indus draine un bassin de 13.700 km. Son débit moyen de 320 m3/s est alimenté par un régime nivo-glaciaire, c’est à dire surdéterminé par la fonte des neiges et des glaciers à partir du printemps.
Sur la Karakoram Highway, Sost – qui se trouve à 2.800 m. d’altitude au confluent entre l’Hunza et la Chapursan - est la dernière ville côté pakistanais avant la frontière. Elle joue un rôle frontalier important pour le contrôle du trafic passager, des flux touristiques et du fret routier puisque c’est ici que se trouvent les services pakistanais de l’immigration et des douanes.
Ces dernières décennies, la forte hausse du trafic entre les deux pays a dopé les fonctions de ce poste. Symbole de ces nouvelles relations transfrontalières, un service de transport de passagers a été ouvert en 2006 entre Islamabad, Gilgit et Sost côté pakistanais et Tashkurgan et Kashgar coté chinois. Le tout est complété par un avant-poste frontalier dans le village de Dih, entre Shachkan et Bara Khun.
Au nord-ouest, Sost est aussi la clé d’accès à la vallée de la Chapursan qui débouche sur la frontière avec l’Afghanistan et le couloir de Wakhan par un haut col. La vallée fut fermée aux étrangers par les autorités pakistanaises lors de l’intervention russe en Afghanistan de 1979 et ne fut réouverte qu’en septembre 1999. De Sost, il faut environ trois heures de voyage pour atteindre le dernier village de la vallée, Zood Khum, perché à 3.300 m d’altitude.
Zoom 3 : La haute vallée de l’Hunza sous très fortes contraintes
Une vallée encaissée dans de très hauts massifs
Ces très fortes contraintes sont particulièrement marquées dans la région qui correspond à la haute vallée de l’Hunza qui monte vers la passe de Khunjerab. La vallée se faufile en particulier entre les hauts massifs de la Barura Wall au nord-ouest (Hachibdar Chhish à 6870 m, Shani à 5887 m) et la chaine du Rakaposhi à l’est (Rakaposhi à 7788 m, Spantik à 7/029 m.). Au nord-est, le Momhil Sar culmine pour sa part à 7343 m.
Dans ce cadre de très hautes montagnes, la qualité des vallées joue donc un rôle majeur dans l’organisation régionale. La vallée de l’Hunza polarise ainsi l’essentiel de l’habitat et les principaux villages, bourgs ou petites villes qui se consacrent à l’agriculture, au commerce et aux services de base. Dans le sud de l’image, Gilgit joue un rôle important à la confluence de la vallée de l’Hunza et de la Gilgit, un affluent de rive droite.
La petite ville de Karimabad/ex-Baltit - où se situe un ancien fort qui était l’ancienne résidence des Mirs de l’Etat princier d’Hunza - est aujourd’hui une destination touristique importante de mai à octobre du fait de l’importance des sommets de plus de 6000 m. qui entourent la région alors que ses anciennes fonctions politiques et administratives se trouvent maintenant dans la ville voisine d’Aliabad.
Le Lac d’Attabad et la coupure de la Kakoram Highway : symboles des risques en très haute montagne
Sur l’image apparaît bien le lac d’Attabad. Long de 21 km et profond de 109 m, il est traversé par l’Hunza. Sa formation est historiquement très récente. Il est du à un immense glissement de terrains survenu en plein hiver, le 4 janvier 2010, qui barra la vallée, tua des dizaines de personnes et occasionna le déplacement de 6000 personnes.
Surtout, cette catastrophe détruisit un tronçon de 27 km de long de la Karakorum Highway, qui fut ainsi coupée plusieurs années. La jonction entre les deux extrémités de la KHH se faisait en effet par barques. La Chine est donc intervenue très vite financièrement et techniquement au côté des autorités pakistanaises afin de restaurer la portion emportée par le glissement de terrain. De gigantesques travaux furent entrepris, en particulier par la China Road & Bridge Corporation (CRBC), en rive gauche de l’Hunza entre juillet 2012 et septembre 2015 pour un coût de 275 millions de dollars. Ces nouvelles infrastructures comportent la construction de cinq nouveaux tunnels d’une longueur cumulée de 7 km et la construction de plusieurs ponts. La dénomination des ouvrages témoigne de manière emblématique des liens tissés entre les deux Etats (« cf. « Pakistan China Friendship Tunnel N°3 »…)
Gilgit, la capitale régionale du Gilgit-Balistan
Située à 1500 m. d’altitude, la ville de Gilgit - vieille capitale de l’Etat princier de Nagar - est la capitale régionale du district de Gilgit et de la région du Gilgit-Balistan. Peuplée d’environ 9000 habitants pour 38 000 km², ce district présente une très faible densité de 0,2 hab./km² qui en fait du fait des très fortes contraintes un espace de hautes montagnes désertiques.
On trouve à Gilgit un aérodrome et un important dispositif militaire, la vallée de la Gilgit étant dotée par le Pakistan d’une route stratégique qui dessert une partie des massifs frontaliers de l’Afghanistan au nord-ouest. D’orientation globalement ouest/est, la Gilgit est en effet longue de 450 km et draine un bassin de 26 000 km². Prenant sa source à 3719 m, elle rejoint l’Indus vers Shimrot. Elle constitue donc pour l’armée pakistanaise un axe régional important vers les zones frontalières de l’Afghanistan. Gilgit est aussi un pôle touristique important pour les expéditions d’alpinisme dans toute la région.